«C’est bon voir quelqu’un faire quelque chose.»
auteur |
Henri Michaux |
œuvre |
Fables des origines (1923) |
mouvement |
– |
genre |
fable, parodie, en intertextualité avec le livre de la Genèse (la Bible) |
discours |
narratif |
registre |
ironique, polémique, tragique |
cadre |
création du monde |
actants |
Dieu, l'homme |
situation |
En contre-pied de la Génèse, Dieu est en proie à l'ennui, ce qui le conduit à créer l'homme. |
quoi ? |
états d'âme de Dieu (ennui, contemplation), création désacralisée (conséquence de l'ennui) |
comment ? |
causalité des actions divines, partage de l'action entre Dieu et les hommes |
pourquoi ? |
renversement des perspectives (c'est Dieu qui a besoin de l'homme), critique de l'inconscience divine (qui joue les trouble-fête) |
Dieu sait faire toute chose. De là son ennui.
De là qu’il voulut d’un être qui ne saurait faire que
peu de chose.
C’est la cause de la création.
Il fit les pierres. Mais quand elles eurent roulé au fond
des ravins, elles ne firent plus rien.
Dieu s’ennuie.
Puis il fit l’eau. Mais l’eau coulait toujours au plus bas.
Dieu s’ennuie.
Puis il fit les arbres, mais ils s’élevaient tous vers le soleil.
Dieu s’ennuie.
Alors Dieu détache un gros morceau de soi, le coud dans
une peau et le jette sur la terre. Et c’est l’homme.
Et l’homme bouleverse la terre, les pierres, l’eau et les arbres.
Dieu regarde. C’est bon voir quelqu’un faire quelque chose.
Parfois lui-même secoue la terre, jette une montagne contre
une autre, souffle sur la mer. Les hommes courent, se débattent.
Et Dieu regarde. C’est bon voir quelqu’un faire quelque chose.
— Henri MICHAUX, «Dieu, la providence», Fables des origines